Louise Peluches | Eleonore Pironneau

Cette série est un auto-portrait dans son vécu d’enfant – le milieu bourgeois dans lequel elle a été élevée a sa violence spécifique, et, à l’époque, particulièrement vis à vis du féminin.

Louise Peluches | Eleonore Pironneau

Je suis pas fana mais si tu y tiens on fera comme ça

Le sous titre de cette série est un commentaire banal que l’on ne remarquerait sans doute pas au cours d’une conversation.
Dans le contexte de ce travail, cette phrase devient un révélateur de ce que les images mettent en scène : la réduction de l’autre au statut d’objet. Sans aller dans le registre de la violence physique qui malheureusement est parfois infligée aux enfants, ces images évoquent de manière métaphorique la violence plus subtile de l’objectivation ordinaire, et les sentiments que cela fait émerger chez l’enfant : incompréhension, rage, désespoir, renoncement/soumission.
En ce sens, cette série est un auto-portrait de l’auteur dans son vécu d’enfant : le milieu bourgeois dans lequel elle a été élevée à sa violence spécifique, et, à l’époque, particulièrement vis à vis du féminin.
Un buste d’enfant en marbre 19è est le modèle principal de la série. Cet objet était dans la maison de famille ainsi que les quelques peluches retrouvées à l’occasion de la vente de la maison après le décès de la mère de l’artiste. Objet familier et intime, il devient par la photographie doué de sentiment, tout en gardant ce statut d’objet / bibelot. Ceci représente exactement le conflit non-verbalisé vécu par la petite fille. Suis-je objet ? Sujet ?
Les différentes mises en scène montrent l’enfant mise en situation de devoir subir. “Rien de bien grave”, apparemment. Elle est vue parfois d'un œil extérieur, accoutrée, ridicule ou embellie. D’autres images suggèrent ses sentiments intérieurs, poignants – mais aussi ses ressources : grâce à sa colère elle trouve un échappatoire pour retrouver son statut de sujet, faisant appel à des protecteurs imaginaires projetés sur les peluches et les masques, qui sont les symboles de sa force et de son énergie de vie.
Pour élargir la perspective de l’expérience personnelle (probablement largement partagée) à une réflexion sur la Photographie, citons Susan Sontag : “Photographier les gens c’est les violer […] cela transforme la personne en un objet qui peut être symboliquement possédé. “(On Photography). Faire le portrait d’un objet expose le processus de réification, faisant même référence à l’auto-objectivation, une pratique exacerbée de nos jours par la vogue du “selfie”.

Cette série est un auto-portrait dans son vécu d’enfant – le milieu bourgeois dans lequel elle a été élevée a sa violence spécifique, et, à l’époque, particulièrement vis à vis du féminin.